mardi 2 juin 2009

Pensée encombrante en période de révisions

C'est toujours pendant ces jours de révision, que les souvenirs affluent avec le plus de force et d'intensité. A recueillir les heures qui remplissent mes journées, je gagne en savoir, je gagne en nervosité, je gagne en doutes. Et pour ne pas sombrer dans la folie, mon corps inutile se remémore les jours de soleil et détente, à se prélasser dans les herbes, quand il pouvait encore se dire vigoureux et en bonne santé. A rester enfermée chez moi, ce sont tous mes tocs qui reparaissent ; j'ai arraché toutes mes petites peaux, j'ai rongé tous mes ongles, et j'enlève méticuleusement chaque cheveu que je retrouve sur mon épaule. Je me console en me disant que ceci n'est que provisoire.

Dans mes trop nombreuses pauses, mon esprit quitte les cahiers, les fiches, et les sommaires, et je perds alors toute notion de temps ; c'est pour cela que mes pauses s'allongent de deux heures, parce que le passé est atemporel. Pour revivre cinq minutes, c'est bien de quelques heures qu'il me faut, et je comprends alors que les nostalgiques sont d'abord des personnes qui ont peur et qui doutent. Puisque le futur est à construire et que le présent se dérobe, il ne reste plus que le passé. Et puisque c'est la seule chose qui nous appartienne vraiment, je m'en approprie comme d'une couverture qui vêtirait mon coeur nu et fragile.

Cette année a été déterminante dans l'appréciation que je me faisais de moi-même, et chaque fois que j'ai douté, je me suis enfoncée dans le travail ou dans le souvenir. En fait, c'est mon réconfort à moi ; ce passé qui n'existe plus, ce passé dont je suis le seul témoin, ce passé qui me renvoie mon histoire et toute la construction de ma personnalité.

Si je n'ai pas osé saisir toutes les occasions, j'ai toutefois su prendre des initiatives déterminantes pour rendre mon passé riche en rencontres, en conversations, et en expériences. Ce sont ces amitiés exceptionnelles qui me réconfortent, quand enfermée chez moi, je braque mon regard vers la fenêtre ouverte. Il me semble que c'est la direction d'une évasion manquée qu'elle me désigne. Malgré le beau temps et les invitations de mes amis, je reste chez moi. Je reste chez moi pour travailler. Pour réussir. Il me suffit de savoir que j'ai vécu de belles amitiés pour me convaincre que je suis suffisamment sensible pour être capable de percevoir et de toucher une autre personne. C'est en cela que le passé me réconforte, car c'est toute mon humanité qu'il me renvoie.

Mais c'est surtout mon avenir que je dois construire. Et surtout surtout, toute la valeur que je m'attribue, que je dois prouver. Toute la confiance en moi, tellement nécessaire pour diriger ma vie - pour me faire devenir maître de ma vie. Tout cet orgueil que je dois justifier, et sans lequel je me demanderais chaque jour l'intérêt de tout. Tous ces espoirs, ces rêves, cette ambition que je dois porter au plus haut sommet du monde.

Et c'est pour cela que je reste chez moi à travailler tous les jours, et que je ne suis presque pas sortie cette année. C'est pour cela aussi que je ne regrette rien. Et c'est ça qui est important, je pense : de ne jamais rien regretter, pour continuer à trouver dans son passé, un refuge agréable.