vendredi 25 février 2011

Rester calme

J'aimerais cesser de croire qu'une multitude d'aventures m'attend pour m'inviter à vivre autre chose que ce que j'ai déjà vécu. J'aimerais cesser de croire que ma vie est si large qu'elle puisse se vivre aussi bien à Québec qu'à Phnom Penh. J'aimerais cesser de croire que je survivrais à mon temps, à mes pulsions, et à ma liberté. J'aimerais apprendre à être honnête avec calme, me poser juste devant elle, la Vérité. Ce n'est pas une nuit où l'improbable m'attend - y croire, c'est toujours espérer - car l'improbable l'est moins avec le temps ; peu de nouveauté lorsque l'esprit est empreint de clichés littéraires bêtes ; peu de voyages quand on s'exile impuissamment avec soi-même ; peu de stimulation extérieure d'ordre intellectuel lorsque l'on n'a pour seule référence son expérience étriquée. Il n'y a pas d'évolution à espérer lorsqu'on est coincé entre la peur et le désir dans un trou situé au fond d'un temps arrêté.
Pourquoi ne pas cesser d'espérer debout pour s'asseoir ? Ce serait se libérer de toutes ces pressions qui exigent de soi la disponibilité, la réceptivité, et l'initiative pour toute nouvelle opportunité de vivre. Simplement se permettre de non-vivre ces opportunités sans s'interroger sur la présence d'un regret importun.

Pour cet avenir, j'aimerais être définitivement lucide et cesser de croire que je vivrais moi aussi une brillante réussite carriériste, un éternel voyage, un grand amour ; qu'une famille m'est acquise de droit, que le dévouement de mes amis est grandiose, que je serai là pour tout évènement qui exigera de moi un héroïsme latent. J'aimerais cesser de me croire libre de toute entrave matérielle, spirituelle, et affective. J'aimerais abandonner tous ces espoirs vains qui m'agitent tous les jours sans rien me faire vivre, parce que tout ce qui est à vivre vient trop lentement pour les années qui passent si vite - plus que soixante années à vivre - toutes ces promesses qui ne se réaliseront jamais, alors pourquoi continuer à espérer, pourquoi continuer à me faire vivre par l'espoir d'être suffisamment vaste ? Je ne dois plus croire que mon être est assez vaste pour rencontrer l'Aventure mensongère et recueillir les richesses de toc promises par la vie, dues par la vie, tant et si désespérément attendues d'elle.