mardi 29 septembre 2009

Première cuite

Hier, j’ai pleuré. J’ai pleuré comme dans mes pires cauchemars, sans m’arrêter, sans pouvoir m’arrêter. Le garçon qui me plaisait m’a dit que j’étais pathétique ; et j’ai bu. J’ai bu, et j’ai pleuré. Si je me rappelle des choses, ce n’est que de ça.
J’ai parlé comme s’il ne me restait que peu de temps, et ce temps, c’était celui d’une soirée. J’ai parlé à Jenny, à Thony, à Marine, à Ingrid, à Helene, j’ai beaucoup parlé, mais pas à celui qui me plaisait. Certains m’ont rajouté sur Facebook ; je ne me rappelle plus d’eux. J’ai du leur dire que c’était pour une soirée, et que même si je les oublierai, c’était quand même important de se parler et de s’écouter. Et voilà, j’ai tout oublié, toutes ces histoires sordides de divorce, de viol, de traumatismes. Elle se sert de pièces montées pour se rappeler à moi ; elle est plus sociable que moi, ma souffrance. Elle trouve les gens, et elle me fait croire que c’est la compréhension des autres qui me relie au monde. Alors j’en reviens à mon livre ; livre-talisman contre ces nuits trop longues, qui me protège des souffrances et des doutes, et qui pourra aider les autres quand tout sera fini.

La vie, c’est comme une fête où on s’ennuie. Tu bois et tu t’oublies dans l’alcool pour faire passer les heures plus vite, et tu attends le matin quand ce sera bien pire ; quand tu verras celui qui te plait dans les bras de celle à qui t’as parlé des heures pour pleurer devant elle. Et le matin, tu sauras relever ton dernier défi, et tu auras la main pour écrire le préface :
« Ceci a été un livre talisman pour moi. Puisse-t-il servir aussi à ceux qui m’ont connu, ceux qui m’ont aimé, et ceux qui me lisent, pour dire à tous ceux là que ce n’est pas de leur faute si ça s’est passé comme ça. »
Mais à ce moment là, tu seras déjà mort.
Pas de doute, la vie, c’est comme ça, c’est cette fête-là.

L’ange du ciel se rappellera-t-il de moi ? Mais les anges sont si propres qu’ils ne s’approchent pas de la souffrance, parce que les êtres bons ne comprennent pas le mal chez les autres. Quand ils boivent de l’alcool, ils en crachent de ces bulles ; de la joie ! du délire ! des couleurs ! ils sont joyeux. Ils flottent dans les airs. Et au matin, ils voleront. Moi, j’ai beau absorber des gorgés, des verres, des bouteilles de légèreté, ça me rend malade comme tout. Je n’en prends jamais assez pour m’envoler. Seul mon esprit volète, mais il se cogne contre les parois de mon crâne. Mon cœur a cessé de battre, c’est dans la tête que sonnent les coups de l’enfer.
C’est la gueule de bois ; mais c’est toi qui est de bois, parce que tu ne comprends pas ce qui t’arrive. Ta sève, c’est l’alcool ; et toi, tu bruisses de paroles et d’eau. Déracinée et défeuillée, l’eau ne t’aide pas à revenir à toi. On te mettra au feu, et c’est dans la fumée et les cendres que tu t’élèveras jusqu’au ciel.
Nul pleurs, sauf les tiens.


Tu es un débris quand tu bois. Ne l’oublie plus.